Si l’on en croit les nombreux scandales et « affaires » relatées par les medias, l’abus de confiance est devenu une pratique récurrente dans la société et en politique. Mais il est également courant dans d’autres domaines, notamment au sein d’entreprises entre plusieurs parties d’un même contrat de travail.
Par exemple, « L’utilisation par un salarié de son temps de travail à des fins autres que celles pour lesquelles il perçoit une rémunération de son employeur, constitue un abus de confiance, engageant la responsabilité pénale du salarié ». Tel est le verdict rendu par les juges le 13 juin 2013, suite au jugement de deux salariés pour abus de confiance au sein d’une entreprise.
L’abus de confiance, qu’est-ce que c’est ?
On trouve la définition de l’abus de confiance dans l’article 314-1 du Code pénal. En effet, « l'abus de confiance est le fait par une personne de détourner, au préjudice d'autrui, des fonds, des valeurs ou un bien quelconque qui lui ont été remis et qu'elle a accepté à charge de les rendre, de les représenter ou d'en faire un usage déterminé. » Ainsi, on parle d’abus de confiance lorsqu’une personne s’approprie ou utilise un bien qu’on lui a confié sans le consentement de l’entité ou des personnes (la victime) qui lui ont confié ce bien.
Pour qualifier un abus de confiance, il convient d’identifier trois éléments :
• le détournement : la partie victime doit prouver que le bien est détourné de son objet principal, lequel est convenu préalablement par la victime et l’auteur de l’abus de confiance ;
• le préjudice : la victime doit aussi prouver le préjudice du détournement de l’objet principal du bien ; pouvant être moral ou matériel, ce préjudice intervient dès lors que le propriétaire est privé de ses droits sur le bien ;
• l’intention : cet élément suppose que la victime souhaite porter préjudice par le détournement, et ainsi nuire à la victime par l’abus de confiance.
L’abus de confiance d’un salarié envers une entreprise
Lors de la conclusion d’un recrutement, le contrat de travail prévoit les droits et obligations de l’employeur et du salarié. Pour ce dernier, le document précise le poste de travail, les missions pour lequel le salarié est engagé, la rémunération ainsi que le lieu de travail.
Il est clair que la rémunération du salarié est perçue par ce dernier en contrepartie de sa mission. Alors, si pendant ses heures de travail, il réalise une activité concurrente à celle de l’employeur, cette activité constitue un préjudice pour l’entreprise.
Tel a été le cas lors de l’affaire suivante (ayant conduit à une décision juridique du 3 mai 2018). Un chef d’agence s’était servi des téléphones et des ordinateurs mis à sa disposition par son employeur, pour mettre sur pied pendant ses heures de travail une activité concurrente, avec l’aide d’une collaboratrice. Une fois au courant des faits, l’employeur a d’abord licencié les deux salariés, puis, dans un second temps, enclenché une poursuite pour abus de confiance.
Après l’examen du dossier, les juges ont admis le délit d’abus de confiance pour un détournement de temps et de travail d’un salarié. Les deux salariés ont été condamnés respectivement à un an et à six mois d’emprisonnement avec sursis.
L’abus de confiance en entreprise : les conditions qualificatives
Plusieurs éléments doivent être réunis pour caractériser l’abus de confiance sur le lieu de travail :
• Un accord préalable, précisé dans le contrat de travail, qui détermine les droits et obligations pour chaque partie. En dehors du milieu professionnel, l’accord peut prendre la forme d’un prêt ou d’un mandat.
• La remise du bien doit avoir été volontaire de la part de l’employeur. Dans le cas contraire, les faits pourraient être qualifiés de vol. Ainsi, l’auteur des faits doit avoir eu conscience du caractère temporaire de la détention du bien de l’entreprise. Il doit avoir été conscient que l’entreprise ne lui a pas cédé la propriété du bien.
• Le détournement : lorsque les deux conditions ci-dessus sont réunies, le salarié se rend alors coupable de l’infraction, sachant qu’il réalise alors un détournement du bien, qui peut prendre la forme d’heures de travail, de biens appartenant à l’entreprise (téléphones et matériels informatiques, dans le cas de la décision du 3 mai 2018). Par ses actes, le salarié s’approprie le bien alors que celui-ci ne lui appartient pas.
Les sanctions et amendes encourues
Quel que soit le milieu où il a été commis, le délit d’abus de confiance est sanctionné d’une peine maximale de 3 ans d’emprisonnement et de 375 000 euros d’amende. La peine encourue peut être portée à 7 ans d’emprisonnement et à 750 000 euros d’amende dans certaines circonstances aggravantes, dont celles où la victime est considérée comme une personne vulnérable.