En tant que salarié, vous bénéficiez du droit de grève. Lorsque vous avez des revendications à l’endroit de votre employeur, vous pouvez, avec d’autres salariés, décider de faire grève afin de vous faire entendre. Mais pendant votre grève, quel est votre droit en matière de rémunération ?
Qu’est-ce que la grève ?
La Cour de cassation définit la grève comme une « cessation collective et concertée du travail en vue d’appuyer des revendications professionnelles ». De cette définition, il ressort que 3 conditions doivent être réunies afin qu’un mouvement soit qualifié de grève.
- L’arrêt de travail doit être franc et complet. Lorsque des salariés décident de venir au travail pour travailler au ralenti ou pour exécuter seulement une partie de leur travail (grève perlée), leur mouvement n’est pas considéré comme l’exercice de leur droit de grève. Pour cela, il faut que la cessation de travail soit totale. Autrement, les salariés s’exposent à des sanctions disciplinaires, la faute lourde pouvant même être retenue.
- Le mouvement doit être collectif et concerté. Si l’aspect concertation ne semble pas si essentiel – le droit de grève étant avant tout individuel et pouvant être utilisé par chacun comme il l’entend (grèves « réactions » ou « surprises » admises) –, l’aspect collectif, lui, est obligatoire. Pour faire grève, vous devez être au moins 2. Une personne seule ne peut donc la faire au sein d’une entreprise, à moins qu’elle n’en soit la seule salariée ou qu’elle n’accompagne un mouvement de grève dépassant le cadre de sa seule entreprise (par exemple, un appel à la grève lancé au niveau national).
- Le mouvement doit avoir pour objet des revendications professionnelles. Si vous décidez de faire grève pour des revendications politiques, alors votre arrêt de travail sera qualifié d’illicite. À titre d’illustration, le mouvement des gilets jaunes n’aurait pas pu être considéré comme l’exercice du droit de grève. En revanche, il n’est pas exclu que les revendications soient aussi politiques si elles sont également professionnelles (exemple : grève contre l’instauration d’une taxe sur le carburant ET contre la réforme des retraites).
Si l’une de ces 3 conditions n’est pas remplie, votre arrêt de travail ne sera pas constitutif de l’exercice du droit de grève. Vous pourrez donc être sanctionnée pour absence injustifiée.
Le salaire pendant la grève
Une suspension du salaire en raison d’une suspension du contrat
Au cours de la période de grève, votre contrat de travail est suspendu. Étant donné que vous ne fournissez aucune prestation de travail à votre employeur, ce dernier n’a pas à vous verser de salaire.
Mais les salaires qui ne vous sont pas versés sont bien ceux du temps de travail que vous n’avez pas effectué. Votre employeur ne peut pas refuser de vous verser votre salaire du mois si vous n’avez fait que 72 heures de grève au cours dudit mois par exemple. Il n’a le droit de vous retirer que le montant correspondant à votre salaire des 72 heures.
Même dans le cas où vous avez participé à une grève illicite n’ayant pas respecté les 3 conditions présentées ci-dessus, votre salaire vous sera dû par votre employeur. S’il ne vous le verse pas, cela pourra être considéré comme une sanction pécuniaire, strictement interdite par la loi. En effet, dans un tel cas, votre employeur ne pourra que vous sanctionner pour absence non justifiée ou vous licencier lorsqu’une faute est retenue.
Pour les primes, le principe n’est pas le même. En effet, les primes doivent être versées aux salariés même pour les périodes au cours desquelles ils étaient en grève. À moins qu’il ne s’agisse de primes pouvant être directement impactées par l’absence (par exemple, prime d’assiduité ou de productivité), leur non-paiement fondé sur le motif d’absence peut être jugé discriminatoire.
Une exception à la suspension du salaire
Il existe un cas où vous pouvez quand même vous faire payer vos heures de grève : lorsque c’est votre employeur qui vous a poussé à faire grève.
En effet, dans certaines situations, il peut être considéré que votre cessation totale de travail est due à un manquement grave de votre employeur à ses obligations :
- il ne paie pas des salaires
- il s’oppose à la demande de suppression d’une prime illicite
- il refuse de prendre immédiatement des mesures pour garantir la sécurité après un accident du travail
- il ralentit volontairement la cadence imposée aux salariés payés aux pièces
Dans un tel cas, l’employeur peut être condamné en justice au paiement d’une indemnité compensatrice des salaires perdus, voire d’une indemnité complémentaire.