Vous avez entendu parler de la hiérarchie des normes et souhaitez en savoir plus. Vous êtes au bon endroit. La hiérarchie des normes est une notion juridique permettant de résoudre les conflits de normes de droit écrit et de déterminer la norme devant être appliquée dans un cas précis. Il s’agit d’un concept fondamental en droit.
Hiérarchie des normes : définition
Les règles applicables dans le domaine du droit peuvent trouver leur origine dans diverses sources : la loi, les arrêtés, les textes internationaux, etc. Ces sources peuvent parfois entrer en « collision » : une même question peut être résolue de façon différente par deux textes, il est alors difficile de savoir lequel appliquer. C’est dans une telle situation que le concept de la hiérarchie des normes est mis en œuvre : pour identifier le texte prioritaire applicable.
La hiérarchie des normes a été théorisée par Hans Kelsen, un juriste austro-américain. Considérée comme l’élément fondamental d’un État de droit, elle est basée sur le principe de légalité selon lequel les actes du législateur et de l’administration doivent être conformes aux règles de droit qui leur sont supérieures.
Pour l’illustrer, Kelsen prend l’image d’une pyramide au sein de laquelle la validité de chaque norme est définie par sa conformité à la norme qui lui est supérieure.
Contenu de la pyramide de Kelsen
La pyramide de Kelsen se compose de 4 étages principaux : le bloc de constitutionnalité, le bloc de conventionnalité, le blog de légalité et le bloc réglementaire.
Le bloc de constitutionnalité
Ce bloc comprend :
- la Constitution de 1958
- le préambule de la Constitution de 1946
- la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789
- la Charte de l’environnement de 2004
- les principes et objectifs à valeur constitutionnelle déterminés par la jurisprudence du Conseil constitutionnel
- les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République (PFRLR) : liberté de l’enseignement, indépendance de la juridiction administrative, etc.
- les principes particulièrement nécessaires à notre temps (PPNNT) : droit de grève, droit d’asile, etc.
- les principes à valeur constitutionnelle dont font partie la continuité de l’État et des services publics
Ce bloc est au-dessus de tous les autres blocs. Toutes les normes doivent le respecter pour être applicables.
Le bloc de conventionnalité
Ce bloc regroupe l’ensemble des traités, les conventions internationales, ainsi que le droit européen. Par exemple, c’est au niveau de ce bloc que l’on retrouve la Convention européenne des droits de l’homme adoptée en 1950.
Ce bloc vient juste après le bloc de constitutionnalité. Ses normes sont donc infra-constitutionnelles (inférieures aux normes constitutionnelles), mais supra-législatives (supérieures aux normes internes).
Le bloc de légalité
Le bloc de légalité est juste en-dessous du bloc de conventionnalité. Les normes de ce bloc sont donc inférieures aux traités et conventions internationales, mais supérieures aux règlements. On y retrouve toutes les normes ayant valeur de lois :
- les lois organiques, c’est-à-dire apportant des précisions sur la Constitution
- les lois ordinaires votées par le Parlement
- les lois référendaires (adoptées par référendum)
- les ordonnances énoncées dans l’article 38 de la Constitution
Le bloc réglementaire
C’est le dernier bloc (le bloc de base) de la pyramide de Kelsen. Il regroupe toutes les normes ayant une valeur de règlement. C’est ici que l’on retrouve :
- les décrets (décrets simples ou pris après avis du Conseil d’État et signés du Premier ministre, décrets pris en conseil des ministres et signés par le président de la République)
- les arrêtés (ministériels, préfectoraux, municipaux…)
À noter : entre le bloc de légalité et le bloc réglementaire s’insèrent les principes généraux du droit (PNG), règles non écrites de portée générale qui s’imposent à l’État (exemples : égalité des usagers devant le service public, égalité devant l’impôt, égalité d’accès des citoyens aux emplois publics, etc.).
Contrôle de la hiérarchie des normes
Le respect de la hiérarchie des normes caractérise l’État de droit. Pour s’assurer de ce respect, différents contrôles ont été mis en place .
Le contrôle de constitutionnalité
Effectué par le Conseil constitutionnel, ce contrôle vise à vérifier que les lois votées par le Parlement et les traités internationaux sont conformes aux normes du bloc de constitutionnalité. Les lois sont contrôlées avant leur promulgation et les traités avant leur ratification.
Le contrôle de conventionnalité
Le Conseil constitutionnel considère que le contrôle du respect par la loi des conventions internationales n’est pas dans ses attributions. Le contrôle de conventionnalité est donc effectué par les juges judiciaires et administratifs, au sommet desquels on trouve la Cour de cassation et le Conseil d’État.
Il vise à vérifier qu’une loi est conforme aux conventions internationales. En effet, dès lors qu’une loi interne est contraire aux textes internationaux, ces derniers deviennent prioritaires. Cette primauté est consacrée par l’article 55 de la Constitution.
Le contrôle de légalité
Ce contrôle sert à vérifier qu’un règlement (décret, arrêté) est conforme à la loi :
- contrôle administratif exercé par l’auteur de l’acte lui-même ou son supérieur hiérarchique
- ou contrôle par les juridictions administratives (tribunaux administratifs, cours administratives d’appel et Conseil d’État) :
- recours pour excès de pouvoir : le règlement est alors annulé à l’égard de tous
- soulèvement de l’exception d’illégalité : le règlement irrégulier est écarté dans le cadre d’une affaire en cours